Al-Hasan al-Basrî avait l’honneur d’être un successeur (tâbi’î) des Compagnons. Par conséquent, quand il comparait la dégradation morale de la dernière période Omeyyade avec la simplicité, la foi sans faille et l’excellence morale et spirituelle des temps précédents, ses mots étaient particulièrement forts. Quand il condamnait et s’en prenait aux changements méprisables de son temps, ses paroles  brillaient de la lumière de son propre chagrin concernant le déclin moral de la Ummah. Son éloquence inégalée, son élocution parfaite et son style unique de paroles, valus à ses sermons une place de haut rang parmi les meilleures littératures arabes de son temps. Comparant la condition morale de son temps avec celle des Compagnons, il observa :

Quel état regrettable cela est : les gens ont été détruits par leurs propres doux espoirs. Ils parlent, mais n’agissent pas. La connaissance est leur mais sans endurance. Ils ont la foi, mais aucune conviction. Pourquoi je vois des hommes, mais pas des esprits ; j’entends beaucoup d’agitation, mais pas une seule âme agréable pour le cœur ? Les gens arrivent seulement pour partir. Ils reconnaissent la Vérité, puis la nient et rendent les choses licites ou illicites à leur guise. Est-ce que votre religion est un voluptueux plaisir ? Si l’on vous demande, « croyiez-vous au Jour du Jugement ? », vous dites oui. Mais non ! Définitivement non. Je jure par le Seigneur du Jour du Jugement que vous avez menti.

Il convient seulement pour le croyant d’être sain de foi, un homme de conviction. Sa connaissance exige de la patience, car la modération est une parure pour les savants. Il est sage, mais avec un cœur tendre ; élégant et retenu [pour cacher sa pauvreté] ; jamais dilapidateur, même si c’est un homme aisé. Il est charitable et compatissant envers les indigents, avec un  grand cœur et généreux lorsqu’il s’agit de donner à ses parents leur dû, infatigable et sans faille quand il doit rendre justice aux autres. Il ne franchit jamais les limites prescrites pour favoriser ses proches, il ne trouve pas non plus de fautes ou ne recherche pas les défauts de ceux qu’il n’aime pas. Un musulman est indifférent aux abus et aux railleries, aux jeux et diversions, aux insultes et aux médisances. Il ne court jamais après ce qui n’est pas son droit, ni ne nie ce qu’il doit aux autres. Il ne s’abaisse jamais à se chercher des excuses, ni ne se réjouit du malheur ou des méfaits des autres. 

Le croyant est humble et révérencieux dans ses prières, il est prompt à s’incliner rapidement devant Allah. Ses paroles sont une guérison. Sa patience vient de sa crainte d’Allah. Son silence est réservé à la réflexion. Il prête attention à ce qu’il voit. Il cherche la compagnie des savants pour acquérir de la connaissance. Il reste silencieux parmi eux pour rester prudent. Et s’il parle, il parle pour être profitable. Il est heureux quand il agit vertueusement. Il recherche le pardon quand il agit mal, et quand on lui reproche quelque chose, il renonce. Il est longanime avec ceux qui agissent bêtement, et se révèle endurant lorsqu’il est mal traité. Il n’abandonne pas la justice même s’il est traité injustement. Il ne cherche aucune protection en dehors d’Allah. Il est digne dans la foule, loue Allah quand il est seul, satisfait de sa subsistance, reconnaissant pour sa prospérité et résigné quand il est en détresse. S’il s’assoit parmi les insouciants il est enregistré comme ceux qui sont engagés dans le rappel, et s’il s’assoit parmi ceux qui se rappellent il est enregistré parmi ceux qui recherchent le pardon. Comme cela étaient les Compagnons du Prophète, chacun selon son statut et comme cela étaient les musulmans parmi vos pieux ancêtres. Mais quand vous changez vis-à-vis d’Allah, Allah change aussi son comportement envers vous. ﴾Allah ne change pas l’état d’un peuple tant qu’il ne change pas ce qu’ils sont, mais s’Il veut châtier une personne, personne ne peut repousser cela. En dehors de Lui, il n’y a aucun protecteur﴿.  {13 :11}